Le Mexique dans un miroir : les ex-voto de San Juan de los Lagos (1870 - 1945)


Pour une sociologie religieuse

Attitude dans l’ ex-voto               Hommes    Femmes


Action de grâce                                   166            233

Action de grâce + narration                   49              29

Narration                                            152              48

Narration + spectateur                            3                4

Spectateur                                              8                8


TOTAL                                                   378            322



Tout comme la partie iconographique de l’ex-voto se partage en deux –récit et remerciement-, la place réservée à chacun des deux sexes est clairement attribuée. L’homme est dans l’action, voire la violence et la négation des valeurs reconnues (famille, propriété, respect de la vie…), et finalement équilibre sentiment religieux et vie dans le siècle. En apparence la femme est beaucoup moins présente dans l’ex-voto, mais aussi sur le devant de la scène, où elle est souvent victime de la domination masculine. Il peut d’ailleurs arriver que la femme se venge, mais alors l’homme éprouve moins le besoin de s’agenouiller. Sans doute Santiago Gutiérrez, sauvagement attaqué par «una querida» (il en avait d’autres?) avait moins de familiarité avec la Vierge  que la jeune Regina Serrano, représentée en action de grâce, alors que son agresseur est assis sous un arbre. Cette familiarité découle aussi, dans le cas de Regina, de sa proximité (presque à la toucher) de la Vierge, elles sont d’ailleurs de taille identique, comme deux amies.

L’ex-voto traduit donc un jeu d’emboîtement d’intercessions : la Vierge intercède auprès «del Ser Supremo», et il revient à la femme d’intercéder pour l’homme qui se trouve au milieu du tourbillon «du siècle». Ce message est d’une clarté limpide dans l’ex-voto où la donatrice a convoqué ici, pour protéger son mari soldat (nous sommes en pleine révolution), deux autres images saintes, saint Antoine et le christ de l’Hôpital !

Selon l’époque, selon le milieu social, retrouve-t-on la même familiarité, la même attitude face à la Vierge ? On pourrait essayer –même si cela est ardu- de recourrir aux chiffres, comme précédemment. Référons-nous, cette fois, à une analyse qualitative, deux ex-voto : c’est le même thème, la maladie. Mais dans le premier cas, nous sommes en 1897, en un milieu que l’on devine aisé, dans le second la scène est plus populaire, date de 1930. Une autre différence, essentielle, touche à l’action de grâce : en 1897, la bourgeoise se fait représenter au pied de la Vierge, comme les donateurs aristocratiques du XIVe siècle, qui ainsi prenaient possession de l’image. En 1930, autres temps, autre milieu, l’action de grâce est reléguée dans un coin, et surtout la donatrice est de dos, minuscule par rapport à l’image. Une humilité plus grande, dans un cadre qui s’est laïcisé?